Douze ans après Man of Steel, Henry Cavill laisse sa cape de Superman à David Corenswet, sous la nouvelle direction de James Gunn. Mais plus qu’un simple retour de l’Homme d’Acier, ce nouveau film Superman a la lourde tâche de lancer un tout nouvel univers connecté au cinéma : le DCU. Le pari est-il réussi pour DC Studios ? Réponse dans notre critique sans spoiler !
Un film humain qui a du cœur
La plus grande force du film réside dans son humanité. Même si Superman peut-être considéré comme un extraterrestre, il a grandi dans une petite ferme du Kansas, élevé par des parents aimants et bienveillants. Ils lui ont transmis des valeurs profondément humaines comme la compassion, la bonté, l’altruisme ou encore la tolérance. Ce sont ces qualités et ces valeurs qui font, bien plus que ses pouvoirs, la grandeur et l’héroïsme de Superman. Et ce film le montre parfaitement : il met magnifiquement en avant cette dimension humaine, lumineuse et pleine d’espoir. C’est un film qui fait du bien et qui redonne le sourire. On ressent l’amour sincère que porte Kal-El à l’humanité et à toute forme de vie sur Terre.

David Corenswet rayonne dans le double rôle de Clark Kent/Superman. Il joue très bien avec cette double identité, que ce soit physiquement ou par le ton de la voix utilisée. À l’image de la série animée Superman: L’Ange de Metropolis de Bruce Timm, il est confronté à des menaces capables de le blesser, loin de l’image du héros invincible et surpuissant souvent jugée ennuyeuse. James Gunn prend alors le contrepied de ce préjugé et introduit un Superman qui n’est pas encore au maximum de sa puissance, promettant une montée en puissance future. Enfin, l’acteur est très expressif, ce qui intensifie le côté humain du personnage, tant mis en avant ici.
Rachel Brosnahan, de son côté, incarne une Lois Lane déterminée. Elle n’hésite pas à confronter son petit-ami pour obtenir son article, ce qui rend leur dynamique intéressante, en plus d’une alchimie palpable entre les deux acteurs. Une scène d’interview entre les deux, en particulier, permet de soulever des questions géopolitiques autour des actions de l’Homme d’Acier. Ainsi, bien que le film soit destiné à un public large, il serait réducteur de le limiter à une œuvre « pour enfants ». Il doit, certes, pouvoir être vu par les plus petits, mais celui-ci se permet en effet de traiter de thématiques plus profondes comme la désinformation, ou certains enjeux politiques très contemporains. Cependant, le film ne sombre jamais dans le cynisme et garde avant-tout un message profondément humaniste.
Lex Luthor, la pire version de l’humanité
Cette humanité s’oppose alors directement celle de Lex Luthor, qui en est la pire version. Nicholas Hoult incarne ainsi un personnage charismatique, rongé par une haine et jalousie démesurée envers celui qui devient soudainement la figure emblématique de Metropolis. Son obsession à son égard est très bien écrite et révèle une part de folie et d’animosité chez le personnage, renforcées par l’excellent jeu de l’acteur. De plus, il dirige ses sbires avec mépris, sans aucun respect ni compassion, ce qui en fait le parfait opposé de Superman.
Néanmoins, le film montre aussi l’intelligence redoutable du personnage, preuve de son génie. C’est ce qui lui permet de représenter une vraie menace crédible pour le héros.
Une œuvre qui assume complètement son matériau d’origine
Là où James Gunn innove véritablement, c’est en assumant pleinement être une adaptation de comics. Il réalise en effet une reproduction fidèle du visuel, de la structure et de l’ambiance d’un comic book. Alors que beaucoup de films de super-héros cherchent à ancrer le monde des comics dans notre réalité, il fait le pari inverse. Cette fois-ci, c’est au spectateur d’entrer dans le monde des comics, et le résultat est absolument réjouissant.

Le film emprunte des tas d’éléments dans différentes ères des comics. Le Silver Age (1956-970) est probablement l’inspiration qui ressort le plus visuellement, notamment à travers la Forteresse de Solitude avec son laboratoire, sa technologie rétrofuturiste et la présence de Krypto. Les robots Superman sont également une inspiration de cette période, ainsi que du comics All-Star Superman. Ce dernier a beaucoup inspiré James Gunn pour la structure du film et les caractérisations de Superman et Lex Luthor. On ressent également les inspirations du Superman originel du Golden Age, avec un Superman engagé, prêt à intervenir dans les conflits politiques. En bref, le co-dirigeant de DC Studios s’est accordé une carte blanche afin de créer son propre mélange, qu’il retransmet efficacement sur grand écran.
Une plongée fascinante dans l’univers DC
À l’image des comics qui regorgent de décennies d’histoires, le réalisateur fait le choix audacieux de plonger directement le spectateur dans un monde déjà en place, dans lequel les méta-humains existent depuis plus de 300 ans. Il faut alors accepter de ne pas tout savoir sur cette genèse des super-héros – ou sur ce Superman dont l’origine n’est pas présentée – et se laisser porter par l’histoire qui nous est contée. Cette décision, qui peut paraître perturbante au départ, permet de gagner beaucoup de temps et de présenter de manière attractive tout le potentiel que ce nouvel univers partagé a à nous offrir.
De plus, Superman est l’un des très rares personnages de fiction si populaire que l’origine est universellement connue. Elle n’a donc pas particulièrement besoin d’être réexpliquée. Cette plongée instantanée dans ce monde fictif permet ainsi de poser rapidement les bases d’un monde riche et cohérent, qui donne envie d’en voir plus. Cela représente donc une très bonne introduction pour le DCU, qui saura probablement intriguer un nouveau public.
Des autres héros bien amenés
Plusieurs personnages des comics DC font ainsi leur première apparition : Metamorpho – The Element Man -, ainsi que la Justice Gang, composée du Green Lantern Guy Gardner, Hawkgirl et Mr Terrific. Il est peu habituel de voir autant de super-héros apparaître dans un film censé être solo, ce qui pouvait inquiéter. Mais rassurez-vous, Superman reste centré sur l’histoire de son héros. Comme dans les comics, ces autres héros ne font que graviter autour du héros principal, comme des collègues de travail, à l’image des membres du Daily Planet. Ils ne sont pas là dans le seul but d’enrichir l’univers, mais surtout pour servir l’histoire de Superman.
Ils apportent également plus de cohérence à ce monde : si un événement de grande ampleur arrive, il est logique que plusieurs héros se rassemblent pour l’affronter. L’absence de l’intervention d’autres héros dans certains films mettant en scène des menaces importantes est en effet quelque chose de critiqué dans beaucoup de films du genre.

Le Guy Gardner de Nathan Fillion est parfaitement fidèle à sa version papier et apporte une légèreté bienvenue avec son humour caractéristique qui est bien dosé. Mr. Terrific brille, quant à lui, dans l’une des meilleures scènes d’action du film et apporte un contraste avec les autres membres de la Justice Gang. Enfin, en ce qui concerne Metamorpho, il impressionne par une adaptation de ses pouvoirs visuellement époustouflante et très généreuse. Mélangeant effets pratiques et effets spéciaux, James Gunn réussit avec brio le pari difficile de retranscrire ce personnage complexe en live-action !
Mais un film non exempt de défauts…
Hélas, malgré ses grosses qualités, Superman n’est pas un film sans défauts. Il en contient même plusieurs… Tout d’abord, l’ensemble s’enchaîne très rapidement, parfois sans transitions, laissant peu de temps pour digérer les nombreuses informations. Ainsi, une vingtaine de minutes supplémentaires auraient certainement permis de développer davantage certaines relations. On regrette notamment que Jimmy Olsen, le meilleur ami de Clark, n’ait pas eu le droit à plus d’interactions avec celui-ci… Idem pour la globalité du casting du Daily Planet, qui n’est que très peu présent. Le film donne envie d’en voir beaucoup plus de ce côté, surtout vu le potentiel comique de la dynamique entre toutes ces personnalités uniques comme Cat Grant, Perry White ou encore Steve Lombard, fidèles à leur version des comic books.
Globalement, ce film manque donc cruellement de scènes avec Clark Kent au Daily Planet, ce que l’on pouvait également reprocher au Man Of Steel de Zack Snyder, sorti en 2013. On aurait également aimé voir le côté maladroit du personnage, quasiment absent ici. Ce type de scènes supplémentaires auraient probablement permis de s’attacher davantage au personnage de David Corenswet.

Autre réserve : la sur-présence de Krypto. Bien qu’il permette d’humaniser Superman et d’apporter une touche de fraîcheur bienvenue au lore cinématographique du personnage, on ressort avec la sensation que celui-ci occupe un peu trop de place dans l’intrigue… En effet, il va jusqu’à désamorcer un affrontement intense et intéressant avec un gag malvenu. Une touche d’humour typique des productions de James Gunn, mais inappropriée dans ce contexte. On ne peut alors s’empêcher de penser que ce temps d’écran aurait pu servir pour montrer la facette journalistique de Clark Kent, malheureusement inexistante dans ce film, ou encore renforcer l’attachement aux personnages humains… Krypto reste toutefois un ajout intéressant au long-métrage, qui devrait ravir les plus jeunes et les amoureux des animaux.
Un autre point négatif réside dans le personnage de Hawkgirl. Interprétée par Isabela Merced, la super-héroïne volante du Justice Gang est très peu utilisée, caricaturale et peu mise en valeur, dans un costume qui est sûrement le moins bien réussi du film. Cela donne légèrement l’impression que James Gunn a placé ce personnage uniquement pour clasher le Green Lantern de Guy Gardner, duo qu’on reverra dans la seconde saison de la série Peacemaker sur HBO Max.
Enfin, le scénariste et réalisateur a opté pour parti pris pour le moins étonnant en ce qui concerne l’héritage kryptonien de Kal-El. Sans en révéler les détails, ce twist permet, certes, questionner le personnage de manière pertinente, mais modifie un élément fondamental du lore de Superman, ce qui pourra diviser les fans. D’autant plus que les comics ont montré au cours du temps de nombreux autres moyens de questionner le personnage. Il reste cependant encore possible de revenir sur cet élément dans une potentielle suite.
CONCLUSION
Malgré ses défauts, Superman est un film lumineux, généreux, plein de cœur, d’espoir et d’humanité. C’est un film qui fait du bien. Pour la première fois depuis longtemps en ce qui concerne les comic book movies, il assume fièrement ses racines et s’en sert pour offrir un spectacle riche, coloré et audacieux. Cela donne le sentiment unique de voir un comic book prendre littéralement vie devant ses yeux.
Au sein d’une époque marquée par un réalisme omniprésent dans le cinéma super-héroïque, Superman a le potentiel de représenter un tournant, en ouvrant la voie à un style plus assumé et plus fantastique. James Gunn embrasse tous les éléments disponibles des comics pour en faire sa propre version de Superman et de son lore, créant un mélange unique. Enfin, en nous plongeant dans un univers déjà peuplé de héros depuis longtemps, il réussit à captiver sans perdre de temps, et donne envie d’en voir bien plus !
Note : 4/5
Il ne reste plus qu’à voir à présent si le public sera au rendez-vous de l’événement !
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